Moebius est largement reconnu comme un très grand dessinateur. Ses dessins atteignent des prix de plus en plus élevés dans les ventes d'art. Malheureusement, ses œuvres sont très mal éditées et cela ne semble pas s'améliorer.
Deux éditeurs, principalement, se partagent les droits de ses œuvres. Ils sont, de façon générale, connus pour le peu de respect qu'ils accordent à leur patrimoine.
Les Humanoïdes Associés disposaient il y a quelques années d'un catalogue fantastique : Francis Masse (L'Encyclopedie de Masse et On m'appelle l'Avalanche), Edmond Baudoin (Théâtre d'ombres et La Croisée, deux albums avec Frank) Jean-Claude Forest (Barbarella), Alberto Breccia (Le Coeur Révélateur, Dracula,L'Éternaute), Frédéric Boilet (3615 Code Alexia). Ils ont tout laissé tomber pour se concentrer sur la production de Jodorowski et de quelques épigones (avec, soyons honnêtes, quelques exceptions comme le Monsieur Jean de Dupuy et Berbérian). Ils éditent les œuvres de Moebius en changeant le format régulièrement (couleurs, noir et blanc, nouvelles couleurs, intégrales, plus intégrales, changement de taille ou de couvertures...). Une chose est constante : l'appareil critique est inexistant. Et les couvertures récentes, pour les recueils reproduisant les éditions nord-américaines, sont particulièrement laides.
J'ai déjà écrit le peu de considération que j'ai pour les efforts patrimoniaux de Casterman : irrespect du format original des albums dans leur collection prétendument de prestige, Écritures ; modifications fréquentes des couvertures, des paginations, voire des mises en page de nombreuses séries à succès, Corto Maltese en tête. Pour l'édition des œuvres de Moebius, elles n'ont rien fait de scandaleux mais se sont contentées du minimum syndical ; et la maquette des couvertures ne brille pas par son élégance...
Parmi les éditeurs actuels de Moebius, on peut également nommer Glénat, pour la remise à jour d'Arzak, et Stardom éditions pour les dernières œuvres, malheureusement éditées de manière trop confidentielle et déjà épuisées pour la plupart (40 jours dans le désert B, Inside Moebius, Le Chasseur déprime).
Bref, la situation actuelle n'est pas brillante.
L'œuvre de Moebius, complexe, proteiforme, publiée dans des supports très variés (Pilote, L'Écho des savanes, Métal Hurlant, À Suivre, BoDoï, etc.), dans des formats très divers (bande dessinée, couvertures de magasines, illustrations diverses, publicités, affiches, croquis préparatoires pour le cinéma, etc.), en perpétuelle évolution, mérite amplement d'être publiée intégralement et de façon structurée : dans l'ordre chronologique, avec un rappel du contexte des différentes publications et des explications sur les évolutions du style de l'auteur.
Dans cet ordre d'idée, les intégrales que Dupuis publie actuellement sont plutôt réussies : réédition intégrale, incluant les récits inédits en album et les dessins de couverture du magazine Spirou, introduction historique dans chaque volume, etc.
Ou, encore mieux, le modèle pourrait être La Chronologie d'une œuvre d'Hergé, sous la direction de Philippe Goddin. La recension quasiment exhaustive des oeuvres, même secondaires, le choix judicieux des illustrations, la beauté des images, notamment celles qui sont agrandies, le soin apporté à la présentation générale, l'élégance de la maquette, font de cette série un modèle du genre pour la publication de l'intégrale d'une œuvre d'un auteur de bande dessinée. Ces gros volumes sont malheureusement vendus à un prix prohibitif pour la grande majorité des lecteurs.
Quel que soit le modèle choisi, l'œuvre de Moebius mérite amplement d'être publiée de façon exhaustive, dans des intégrales respectant la chronologie et disposant de textes critiques suffisamment bien conçus pour replacer les différents travaux dans leur contexte. C'est pour l'instant très loin d'être le cas...
comment retrouver du vrai Moeb' sans se ruiner chez les bobos spéculatos de la rue Dante ? Scanner des Métal Hurlant pour une édition décente des bd aujourd'hui rééditées par des cochons ? Les outils grd public permettent d'imprimer proprement à usage d'amateurs ... Désolante cette production intimiste qui sévissait déjà du vivant du maître ... Les ayant-droits auront-ils aussi droit au respect des fans de leur père qui nous manque déjà tant...
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