jeudi 12 janvier 2012

Godard au travail, les années 60, d'Alain Bergala (2006)

Dans cet ouvrage passionnant, Alain Bergala relate le déroulement du tournage de tous les longs-métrages de Jean-Luc Godard, lors de sa première période à l'intérieur du circuit commercial traditionnel, soit d' À bout de souffle à Week end (qui marqua, pour le réalisateur la « fin de cinéma », comme je le rappelai dans un message en 2010...).

Ce livre m'a appris, ou m'a confirmé, de nombreuses anecdotes, m'a remémoré maints passages marquants de ces films et m'a éclairé, très partiellement bien évidemment, sur le processus créatif du cinéaste suisse.

J'ai ainsi appris que, loin de l'image du réalisateur génial et mégalomane qui fait le désespoir de ses producteurs en explosant les budgets, Jean-Luc Godard, bien au contraire, terminait tous ses films dans les délais et avec un budget inférieur aux prévisions. Cela était notamment rendu possible par un plan de travail précis et respecté d'assez prêt. En effet, contrairement à la légende qu'il s'est efforcé de créer, Godard n'improvisait pas ses films ; les principales séquences étaient programmées et il suivait son plan de travail. Cela ne l'empêchait cependant pas de laisser ses acteurs dans le flou, de ne leur donner leurs dialogues qu'au dernier moment, voire de les laisser improviser (ah, le fantastique « je sais pas quoi faire, j'ai rien à faire... » d'Anna Karina dans Pierrot le fou) ou de leur dicter leurs paroles directement pendant le tournage (grâce à un système d'oreillettes). Toujours inquiet de ne parvenir à avoir suffisamment de film (pour atteindre la durée traditionnelle d'une heure et demie), il se laissait également toujours la possibilité de tourner des scènes de digression, plus ou moins improvisées, reliées de façon souvent lâche à l'intrigue principale, qui peuvent sembler être là pour « meubler » mais qui apportent en fait énormément au charme de ses films (je viens de voir Bande à part dans lequel c'est particulièrement frappant : les scènes de la danse dans le bar, de la course au Louvre ou de la minute de silence, bien qu'éloignées de l'intrigue principale, sont de superbes moments de cinéma...).

Qu'ai-je découvert d'autre ? L'influence sur Godard d’œuvres comme le Voyage en Italie de Rossellini (comment tourner un film avec guère plus qu'un couple et une voiture) ou Le Désert Rouge d'Antonioni, notamment pour l'utilisation de la couleur (ce qui se comprend aisément...) ; l'inventivité de Godard pour surmonter les contraintes techniques rencontrées et en tirer des opportunités artistiques nouvelles (du manque de place pour tourner aux problèmes de pellicules...), et bien d'autres choses encore.

Une passionnante porte ouverte sur le processus créatif d'un des plus grands cinéastes francophones.

2 commentaires:

  1. Dommage que Bergala nous raconte autant d'anecdotes de surface et qui sont si loin mais si loin du "Godard au travail". Ces anecdotes sont en plus répétitives. Heureusement Godard au travail ce n'est pas cela. Il suffit de regarder les films pour s'en rendre compte.

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  2. Il est clair qu' "observer" le travail de Godard, et être capable de raconter des anecdotes, ne signifie pas forcément "comprendre" le travail de Godard.
    Cependant, même si ce livre reste un peu à la surface des choses, j'y ai appris un certain nombre d'éléments instructifs sur la méthode du cinéaste...

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