J'avais envie de vous parler de l'excellent strip de Richard Thompson, Cul de Sac, depuis un certain temps. Je ne l'avais pas encore fait, essentiellement par manque de temps. Voilà que la triste nouvelle du décès de l'auteur me rattrape : Richard Thompson est mort le 27 juillet 2016, à 58 ans. Atteint de la maladie de Parkinson, il avait arrêté Cul de Sac en septembre 2012.
Les strips sur de jeunes enfants ont longtemps fleuri dans la presse, notamment états-unienne. Depuis The Katzenjammers Kids (Pim Pam Poum en français) créés par Rudolph Kirks en 1897, plusieurs chefs-d'œuvre de la bande dessinée mondiale sont issus de ce genre : les Peanuts et Calvin et Hobbes aux États-Unis, Mafalda en Argentine, etc. (on pourrait citer d'autres œuvres, européennes, telles que Quick et Flupke de Hergé, mais elles ne relèvent pas du comic strip quotidien à proprement parler). Entre le déclin qualitatif du comic strip de façon générale et cette multiplicité de chefs-d'œuvre déjà existant, il pouvait sembler difficile de renouveler le genre de façon pertinente : Schulz et Watterson n'avaient-ils pas déjà épuisé le potentiel comique de ce type d'histoires ?
Richard Thompson nous a montré qu'il n'en était rien. Avec Cul de Sac, il a publié pendant 8 ans une œuvre personnelle et très drôle, clairement distincte de celles de ses illustres aînés.
Dans Cul de Sac, nous suivons le quotidien d'Alice Otterloop, une fille de maternelle à l'imagination débordante, pleine d'énergie et parfois difficile à canaliser. Ses amis l'accompagnent dans ses jeux et délires de façon plus ou moins consentante. Son frère, Petey est un fan de comics qui a des difficultés à entrer en contact avec le monde extérieur et avec ses camarades. Madeline et Peter, leurs parents, tentent tant bien que mal d'élever leurs exubérants bambins... On retrouve bien entendu certains éléments d'autres strips : Alice a une imagination presqu'aussi délirante que Calvin ; Petey a des difficultés relationnelles comme Charlie Brown. Mais, globalement, Richard Thompson a su trouvé un ton et créer des personnages vraiment originaux. Alice partage ses délires avec ses camarades, quitte à les déstabiliser. Petey a peur du contact avec les autres, comme il a peur du ballon lorsqu'il joue au football...
Le style graphique de Richard Thompson est également unique : très vif, il n'a pas l'aspect plus propre et policé des ses glorieux aînés, et ceci en parfaite adéquation avec sa narration très syncopée et ses personnages souvent au bord de l'hystérie. Cul de sac est vraiment une œuvre originale et très drôle, dans un genre pourtant à la fois très contraint et déjà riche en œuvres majeures.
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