mardi 22 juin 2010

L'Eternaute, d'Oesterheld et Lopez (1957-1959)

J'ai longtemps été persuadé que L'Éternaute, d'Oesterheld et Lopez, ne serait jamais traduit en français. Certes, la version plus tardive dessinée par Breccia fut disponible un temps dans nos contrées. Mais cette réécriture, malgré tout le génie du dessinateur, était bien inférieure à la version originale ; sa publication fut interrompue pour des raisons politiques, je crois, et le récit n'a pas du tout le temps de prendre l'ampleur nécessaire.

L'Éternaute première version, pensez donc : un récit des années 1950 (publié initialement entre 1957 et 1959), en noir et blanc, de plusieurs centaines de pages, avec de longs narratifs et un récit ancré dans une ville mal connue du public francophone, Buenos Aires... Quel éditeur pouvait avoir le courage de parier sur un tel livre dans les années 2000 ? Eh bien Vertige Graphic a eu le cran de tenter l'expérience. Grâce lui en soit rendue.

En effet L'Éternaute est, à mon avis, une des plus grandes réussites de science-fiction en bande dessinée. Peu de récits sont parvenus ainsi à conjuguer une atmosphère d'angoisse et des personnages si profondément humains, une peinture si originale et si forte d'extra-terrestres loin des monstres de Star Wars et un récit dont la tension monte régulièrement tout au long de ses centaines de pages. Son ancrage dans des lieux existants de Buenos Aires accroît encore son profond réalisme et met d'autant plus en relief les pérégrinations des personnages principaux dans un monde si familier par certains côtés mais dont ils ignorent soudain les règles les plus importantes, celles qui décideront de leur vie ou de leur mort.

À la lecture de ce chef d'oeuvre de la bande dessinée et de la science-fiction, le seul point de comparaison qui me vient à l'esprit est La Guerre des mondes, d'H.G. Wells. L'Argentine fut un grand pays de bande dessinée pendant quelques décennies ; L'Éternaute en est une des meilleures preuves.

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