Je viens de relire Love & Rockets X, de Gilbert Hernandez, aux éditions Fantagraphics (en français chez Rackham). Il s'agit à mon avis du meilleur récit de cet auteur, ce qui n'est pas peu dire... On retrouve en effet dans cet album un condensé de ce qui constitue le meilleur de son œuvre.
Il enrichit dans ces pages un monde déjà riche et cohérent, foisonnant de lieux et de personnages qui parcourent, parfois subrepticement (je pense notamment à Maria, la mère de Luba, croisée au détour d'une case), les histoires de ce fantastique conteur. Il nous offre un passionnant kaléidoscope de l'Amérique des années 1990 : de Los Angeles à Palomar (ville imaginaire d'Amérique latine), des beaux quartiers d'Hollywood aux ghettos noirs des faubourgs, des amateurs de punk aux rappeurs, des skin-heads aux idéalistes de gauche. Gilbert Hernandez mêle d'innombrables personnages, Blancs et Noirs, Asiatiques et Mexicains, Juifs et Arabes, en de complexes fils narratifs entrelacés entre eux.
Enfin on peut particulièrement admirer sa maîtrise de l'ellipse. Gilbert Hernandez choisit en effet avec un art impressionnant les moments de la vie de ses personnages qu'il relate et ceux qu'il laisse à l'imagination du lecteur. Pas de superflu chez lui, pas de remplissage ; toute donnée inutile, que ce soit pour l'histoire ou pour l'ambiance, est laissée de côté. C'est tout spécialement visible dans les dernières pages de l'album. Chaque scène est constituée d'une case unique (à raison de 9 par pages) : dans la case suivante l'auteur suit d'autres personnages, que l'on pourra retrouver 3 cases plus bas ou 2 pages plus loin. Ces ellipses à répétition, si elles risquent de laisser sur les bords du chemin les lecteurs les moins attentifs, donnent au récit un tempo et une densité rarement égalés en bande dessinée.
N.B. : On pourra lire une chronique de cet album, très intéressante et beaucoup plus détaillée sur ce blog exclusivement consacré à Love and Rockets.
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