J'ai lu récemment trois ouvrages qui traitaient, partiellement pour l'un, exclusivement pour les autres, de l'œuvre de Dostoïevski.
Dans Le Drame de l'humanisme athée, Henri de Lubac voit en Dostoïevski un champion du renouveau du christianisme au XIXe siècle, avec Kierkegaard, face aux tenants de « l'humanisme athée », Comte, Feuerbach et Nietzsche en tête.
Dans son Dostoïevski de 1923, André Gide insiste sur le génie romanesque de l'auteur russe, sur son acuité psychologique. Il souligne également l'importance de son caractère slave et la présence dans son œuvre de manifestations de l'acte gratuit (l'acte gratuit étant un des sujets capital des Caves du Vatican publiées par Gide en 1914).
Dans Dostoïevski : du double à l'unité, en 1963, un de ses premiers livres, René Girard livre lui aussi une lecture toute personnelle de l'œuvre de l'auteur des Frères Karamazov. Il lit en effet celle-ci à la lumière des prémisses de sa théorie du désir mimétique (cet ouvrage est à ce titre relativement anecdotique dans le corpus girardien : la théorie mimétique n'en est qu'à ses balbutiements et les arguments en découlant y sont relativement peu clairs ; pour découvrir la vision que propose René Girard de Dostoïevski, on préfèrera la lecture de Critique dans un souterrain, publiée en 1976 et beaucoup plus aboutie).
Ces lectures de l'œuvre du génie russe me semblent toutes les trois pertinentes, au moins par certains aspects, mais sont radicalement différentes. C'est peut-être là une des marques d'une œuvre géniale : permettre des approches multiples et variées. Depuis plus d'un siècle, les romans de l'auteur de Crime et Châtiment sont analysés et appréciés par des personnes que tout oppose par ailleurs. Et, malgré ces multiples lectures, le sens et la richesse de l'œuvre de Dostoïevski sont encore loin d'être épuisés...
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