dimanche 24 juillet 2011

Contre-Histoire de la philosophie, de Michel Onfray (2006-2009)

J'ai entamé la Contre-Histoire de la philosophie, de Michel Onfray, il y a un an ou deux. De temps, en temps, j'emprunte à la bibliothèque un des six volumes de cette série. J'en ai pour l'instant lu quatre. J'aurais pourtant bien des réserves à formuler sur la pensée de Michel Onfray.

À mes yeux, son principal défaut est le manque de finesse de ses analyses, et tout spécialement de ses critiques. C'est particulièrement frappant lorsqu'il aborde, et il le fait souvent, deux de ses cibles favorites : la religion chrétienne et le libéralisme économique. Il schématise alors ces deux modes de pensée jusqu'à leur plus grossière caricature, tant et si bien qu'il n'a plus face à lui que de ridicules épouvantails contre lesquels il se fait le plaisir d'envoyer ses attaques pourtant bien éculées... Ce schématisme de la pensée est également, il faut bien l'admettre, ce qui lui permet de synthétiser simplement des pensées parfois complexes et d'offrir à son lecteur six ouvrages d'une lecture très aisée alors qu'ils traitent de sujets souvent arides. Mais ce schématisme appliqué également aux philosophes qu'il défend m'a parfois rendu ses attachements incompréhensibles : pour certains auteurs dont il relate la vie et résume l'existence, sa synthèse est si simplifié que je n'ai guère compris pourquoi il souhaitait tirer de l'oubli ces philosophes oubliés...

Michel Onfray a le grand mérite de replacer dans leur contexte les philosophes dont il parle, de ne pas en faire, comme c'est trop souvent le cas, de purs esprits, et de mettre en lumière l'influence de leurs expériences de vie sur leur pensée. Mais cette insistance sur la vie va parfois, à mon avis, trop loin, notamment lorsqu'elle prend le pas sur la pensée de ces auteurs. J'ai ainsi trouvé plus qu'étrange de considérer Schopenhauer comme un épicurien ; cela correspond peut-être à la vie qu'il a menée, mais bien peu à la philosophie qu'il a enseignée...

Ces critiques sont sévères. Pourquoi alors continué-je à lire cette Contre-Histoire ? Eh bien, comme Michel Onfray, je suis convaincu que l'histoire "officielle" de la philosophie, en tout cas en France, a le plus souvent le grand tort de considérer comme fleuve de pensée dominant, voire quasiment unique, un certain idéalisme, qui va de Platon à Descartes, puis à Kant, Hegel et Heidegger, laissant de côté maintes pensées riches et variées. Michel Onfray a le très grand mérite de nous faire découvrir une partie de ces penseurs laissés pour compte des synthèses chronologiques traditionnelles de la philosophie. Il a en outre l'avantage, comme je le disais rapidement plus haut, de ne pas considérer les philosophes comme de purs esprits, mais de les replacer dans leur vie et leur existence matérielle.

Voilà pourquoi, malgré le schématisme de sa pensée et la naïveté de ses attaques, je continue à lire Michel Onfray...

3 commentaires:

  1. Bravo pour votre propos mesuré que je partage. Michel Onfray a des défauts, nombreux, que vous avez souligné, mais il a aussi une énergie, une volonté de transmettre, une éloquence (pleine de tics de langage finalement agaçants) et une fougue qui emportent. Parmi ses conférences je trouve que ses "réponses au public" sont les plus intéressantes. Il convoque les auteurs (leur fait dire peut-être un peu ce qui sert le mieux son propos au mépris d'une vraie finesse d'analyse) et développe sa pensée de façon souple et harmonieuse. Il est moins pertinent quand il instruit systématiquement à charge (contre Freud notamment. Non, qu'il ait eu tort de déboulonner l'icône, mais bon, à un moment il faut lâcher sous peine de voir l'argumentaire tourner à l'acharnement...)
    Votre blog est riche, ouvert, curieux et j'y passe toujours avec grand intérêt... Bonne continuation...

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    1. e qu'il déboulonne sur Freud ce n'est pas la personne de Freud c'est plutôt l'aspect scientifique et universel de sa théorie, aspect qui lui est ardemment défendu par les psychanalystes fanatiques de Freud. D'autres l'ont d'ailleurs fait avant Onfray, cf "les Freudiens hérétiques" tome 8 de la contre histoire

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  2. Merci pour ces encouragements et ces compléments sur Michel Onfray.

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