jeudi 2 juin 2011

The Tree of life, de Terence Mallick (2011)

The Tree of life est-il le film qui méritait le mieux la Palme d'or ? est-il un des plus grands films de la décennie, comme certains l'espéraient avant sa sortie ? Je ne saurais dire. Ce que je peux affirmer en revanche, c'est qu'il s'agit, à mon avis, d'un excellent film. J'ai passé, en le voyant, un très bon moment (et, pour répondre d'emblée à certaines critiques, je ne me suis pas ennuyé un instant, j'ai même trouvé qu'il aurait pu durer un peu plus longtemps). En outre, il explore des chemins trop rarement exploré au cinéma.

C'est tout d'abord un film de toute beauté : les images sont magnifiques, la musique est très bien choisie et superbe. Le film tourne, notamment, autour du thème de la perte d'un être cher, un fils et un frère en l'occurence. À partir de cet événement tragique, à peine montré, il soulève de nombreuses questions tant relationnelles (les relations entre frères, entre le père et ses fils...), psychologiques (la force du souvenir), que métaphysiques (l'existence de Dieu, la Vie et la Grâce, le sens de la vie, etc.). Exposé comme ceci, cela peut sembler grandiloquent, pédant. Mais c'est fait de façon très subtile : le film n'impose rien, toutes les questions sont laissées ouvertes. C'est plutôt une porte grande ouverte sur la méditation et la rêverie.

Le film alterne les passages sur la naissance de l'univers et de la vie, la vie de Jack avec ses deux frères et ses parents (Brad Pitt jouant le rôle du père, Mr. O'Brien) dans les années 1950 et les rêveries de Jack adulte (Sean Penn) de nos jours. Ces trois types de séquences, chacun dans leur genre, sont très réussies : les passage sur la naissance de la vie (soutenus parfois par une voix off évoquant le sens de l'existence) sont très esthétiques ; la description de la vie familiale des O'Brien est finement analysée ; enfin Sean Penn crève l'écran lorsqu'il rêve au milieu des gratte-ciels.

Comme je le disais en introduction, ce film parcourt des chemins trop rarement fréquentés par le cinéma. Je considère depuis longtemps qu'il est dommage de construire tous les films d'abord et avant sur un scénario clair. Par l'alliance entre l'image et le son, le cinéma offre des possibilités esthétiques, émotionnelles et poétiques trop rarement exploitées. On observe ainsi une dichotomie entre des films de cinéma avec une 'histoire' claire d'une part, et des vidéo considérées comme des 'oeuvres d'art' produites par des artistes contemporains et exposées dans les galeries et les musées d'autre part. N'est-il pas possible de créer un continuum entre ces deux formes d'expression et d'introduire dans les films de cinéma des passages qui échappent à la linéarité d'un scénario bien balisé ? The Tree of life explore ainsi des voies métaphysiques et poétiques bien trop rarement vues au cinéma.

En lisant quelques critiques ce ce film, dans Le Monde, Télérama ou sur Internet, j'ai été frappé par les avis extrêmement réducteurs portés sur ce film. Alors que Terence Mallick nous offre une oeuvre ouverte, posant des questions mais sans imposer aucune réponse, les critiques du film ont cru bon d'apporter des interprétations définitives et particulièrement réductrices. Ainsi, au début du film, la voix off oppose la "vie" et la "grâce". Le critique du Monde s'empresse alors d'assimiler le père à la "grâce" et la mère à la "vie", nous imposant alors une vision réductice, voire un contre-sens complet. De même le critique de Télérama assimile les images finales du film à une vision de l'au-delà. Ne peuvent-elles pas plutôt représenter un rêve de Jack adulte ? Je pourrais multiplier de tels exemples à l'envi. Comme si tous ces critiques avisés, professionnels ou amateurs, ne supportaient pas la riche polysémie de ce beau film et cherchaient à en réduire au maximum l'infinité de sens possibles, au prix d'interprétations personnelles et limitées...

Un superbe film, à voir et revoir, à contempler et méditer...

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