Dans ce chef-d'œuvre publié en 1996 à l'Association, il a cherché à dépeindre rien moins que la guerre finale des démons au cœur de l'Enfer. Au début du livre, nous pénétrons dans les enfers sur la barque de Caron, avec un groupe de damnés. Puis, tout au long des 300 pages de ce monument, nous voyons se dérouler le conflit le plus dantesque que nous puissions imaginer : une querelle entre deux démons dégénère pour se propager dans tout le royaume des ombres.
Le plus gros risque pour un tel récit serait de passer à côté du caractère grandiose du sujet. Il en faudrait peu, un dessin un peu trop académique, un récit trop linéaire, trop rationnel, pour tomber du dantesque dans le grotesque, pour sombrer dans le grand-guignol. Aristophane échappe à tous ces écueils. Ses personnages ne sont que haine, orgueil et démesure. Son dessin très particulier, souvent à la limite du lisible, échappe à tout académisme. S'il risque d'égarer certains lecteurs peu perméables à ce type de lyrisme, il offrira aux autres une plongée dans un monde réellement inhumain : de traits de plume acérés aux grandes taches noires, l'expressionnisme d'Aristophane nous donne un aperçu d'un monde au-delà de toute imagination.
Dans des genres qui n'avaient rien à voir avec ce chef-d'œuvre, Aristophane publia deux livres en 1993 et 1995 puis un ouvrage, Les sœurs Zabîme, chez Ego comme X, la même année que Conte Démoniaque. Il ne devait publier ensuite que quelques récits dans des revues avant de disparaître en 2004. Malgré sa trajectoire éclair, il a dessiné au moins une œuvre qui mérite de laisser sa marque dans l'histoire de la bande dessinée.